Approche socio-historique de la lutte contre les infections nosocomiales en France
Résumé en Français
Cet article se propose d’aborder l’émergence de l’infection nosocomiale en tant que problème de santé publique comme le résultat d’un processus socio-historique spécifique. En étudiant la Revue d’hygiène et de médecine sociale de 1953 à 1988, ainsi que le discours d’acteurs nationaux de la lutte contre les infections nosocomiales, on peut montrer que ces infections deviennent, en France, un problème de santé publique reconnu quasi indépendamment de critères objectifs de fréquence ou de gravité et que les enjeux professionnels et sociaux y jouent un rôle déterminant. Les infections nosocomiales sauvent ainsi la place de l’hygiène, en tant que discipline, qui semblait condamnée par la nouvelle organisation hospitalo-universitaire mise en place suite à la loi de 1958. Une fois à l’hôpital, les hygiénistes entrent en concurrence avec certains microbiologistes qui investissent également cet objet, lequel se trouve finalement de plus en plus convoité par de multiples acteurs. Au delà de la construction d’un problème de santé publique, se constitue ainsi un véritable champ de luttes symboliques.
English abstract
This article argues that the emergence of nosocomial infections as a public health issue is the result of specific socio-cultural processes. An analysis of the French periodical Revue d’Hygiène et de Médecine Sociale over the period 1953-1988 and of the discourse of national actors in the fight against hospital-acquired infections demonstrates that the recognition of nosocomial infections as a public health issue occurred almost independently of objective criteria related to frequency or severity. It is suggested that professional and societal factors provide a better explanation of the emergence of nosocomial infections as a public health issue. Nosocomial infections essentially rescued ‘Hygiene’, a discipline threatened by the reorganization of the university-hospital system following the 1958 reform. Having entered hospitals, hygienists have had to compete with microbiologists also involved in a subject that has attracted an increasing number of actors from a range of fields. Beyond the development of a public health issue, a battlefield of symbolic fights is thus emerging.
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Texte intégral sur www.cairn.info/resume.php?ID_ARTICLE=SPUB_104_0367
Santé publique n°4, Juillet-août 2010 | p. 367 à 378 | publié le 30 décembre 2010